The album featuring violin music by Debussy, Hahn and Stravinsky was given the highest distinction by Classica magazine:
Troublant de poésie
Dans ces chefs-d'oeuvre pour violon et piano, Aylen Pritchin et Lukas Geniušas forment un duo à la complicité infinie.
C'est avec un subtil mélange d’énergie et de sensualité qu'Aylen Pritchin et Lukas Geniušas ouvrent leur programme. Leur Sonate de Debussy offre une vision ivre de liberté qui met à nu son chaos intérieur, depuis la lutte angoissée de l’Allegro vivo initial jusqu'aux grisants chromatismes du final, en révélant avec une clarté inouïe le monde fantastique – et sans doute à jamais broyé par la guerre – qu'elle dépeint. Dans le Duo concertant de Stravinsky, qui figurait au programme de leur premier récital il y a dix ans, les deux interprètes démontrent, outre leur infinie complicité, l'attention qu'ils portent au moindre détail du texte, en matière de dynamique comme de couleur. Dimension d'autant plus significative que l'auteur du Sacre n'affectionnait pas naturellement l'alliance sonore du piano et des archets. De cette fresque ayant pour toile de fond la Grèce antique, évoquée par un style archaïsant autant que par le titre des cinq mouvements, non sans quelques clins d'oeil à J. S. Bach, Pritchin et Geniušas livrent une lecture habitée d'une troublante poésie, qui la hisse au niveau des versions les plus abouties, dont celle d'Itzhak Perlman et Bruno Canino (EMI, 1974). Entre les deux, le climat alangui de la Sonate de Reynaldo Hahn offre une ponctuation originale. Qualifiée en son temps de « petit chef-d'oeuvre d’équilibre, de concision et d’élégance », elle n'a pourtant toujours pas trouvé sa place au sein du grand répertoire. Habitée d'une grâce schubertienne, d'un colorisme fauréen et d'une tendresse toute proustienne, elle ne manque pourtant pas d'atouts pour séduire, surtout lorsqu'elle est défendue avec tant de conviction. Forts de timbres raffinés, d'une souplesse extrême du ton (Sans lenteur), tantôt finement espiègles (Véloce), tantôt délicatement rêveurs (Modéré), piano et violon rivalisent de sensibilité comme d'imagination. Voilà un magnifique duo, de ceux destinés à laisser une empreinte.
Jean-Michel Molkhou